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TIM INGOLD
L'anthropologie comme éducation

" En résumé, je souhaite démontrer que l’éducation est avant tout un mode d’attention et non de transmission, que c’est grâce à cette attention que le savoir est généré et transmis. "

" L’éducation consiste véritablement à faire attention aux choses, et au monde, pour en prendre soin."

"Mais comme l’observe Dewey, la proximité physique ne crée pas en soi une communauté : « Un livre ou une lettre peut créer un lien plus intime entre des êtres humains séparés l’un de l’autre par des milliers de kilomètres qu’entre deux proches vivant sous le même toit.» Ce qui importe, c’est de partager une expérience. C’est l’avis de Dewey. Ni les sons ni les lettres écrites, insiste-t-il, n’ont de sens en soi. Ils tirent tout leur sens, comme le font les choses, de leur implication dans l’expérience partagée d’une activité commune. L’entente sur le sens des mots est le fruit de la mise en commun : nous devons sans cesse y travailler et c’est pour cette raison que le sens est toujours provisoire, jamais définitif. "


 " "L’éducation, déclare le poète irlandais William Butler Yeats, ce n’est pas remplir un seau. C’est allumer un feu." Le seau offre de la certitude et de la prévisibilité, un point de départ et un autre d’arrivée, avec des étapes intermédiaires quantifiables. Il comporte des résultats, qui doivent être connus et compris avant même le début du processus. Le feu, quant à lui, nous expose à des risques. On ne sait pas ce qui le fera prendre ou non, combien de temps il brûlera, où il s’étendra ni quel sera le résultat."

« À l’origine, conclut-il, la liberté n’a rien à voir avec l’absence d’obstacles ou de contraintes. Elle « porte plutôt un sens positif qui est à la fois politique, biologique et physique et rappelle l’expansion, l’éclosion ou la croissance commune, une croissance qui rassemble »( Esposito)."

 « Aujourd’hui, cependant, nous vivons un moment charnière de l’histoire de l’université. Après près de trois siècles, le modèle de production de savoir académique issu des Lumières est sur le point de s’effondrer, si tel n’est pas déjà le cas, ainsi que les puissances hégémoniques qui l’ont autrefois favorisé. Comme souvent à des tournants similaires, au lieu d’aboutir à un compromis ouvert sur de nouvelles façons de savoir et d’être, et ouvert à des voix auparavant étouffées ou ignorées, nous assistons à l’inverse à l’émergence de tous côtés de fondamentalismes fermés et bien-pensants, qu’ils soient religieux, politiques ou économiques, en provenance de l’église, de l’état ou du marché. Ces mouvements représentent une menace sans précédent à la future démocratie et à la coexistence pacifique. Pourtant, les universités ne font pas grand-chose pour éliminer cette menace. Au contraire, l’effondrement de leur mission civilisatrice descendante a laissé un vide qui se remplit trop volontiers d’intérêts commerciaux. À l’instar d’autres institutions publiques, les universités offrent des cibles faciles pour le mercantilisme."

 


YVON INIZAN
Ce que le poète dit au philosophe

"On touche dans le sensible l'unité profonde de tout." (Yves Bonnefoy, L'Improbable)

"Une couleur est une émotion. La séparation entre l'expérience émotionnelle et l'expérience présentationnelle ne se fait qu'à un stade relativement tardif de la pensée; l'expérience primitive, c'est celle d'une émotion sentie dans sa relation avec un monde situé au-delà, émotion obscure, aveugle, relation vague. Et le sentiment esthétique n'est pas autre chose que le réveil, à certains moments privilégiés, de cette attitude primitive, où les contrastes et les synthèses de couleurs par exemple sont directement sentiments. " (Jean Wahl, Vers le concret)

"Là où se continue incessament la droite ligne de la prose et du prosaïque et, par là, une forme de maîtrise et de domination, la poésie est, par essence, interruption, rupture, syncope et, par conséquent, elle est aussi, essentiellement, son et rythme, sonorités et scansions — c'est-à-dire voix. Elle laisse paraître le corps, sa respiration, son souffle. En deçà d'un texte lu, dans l'expérience d'un corps essoufflé, le cœur saignant continue de battre son rythme. Si le poème se nourrit de la signification des mots, du moins, en sa forme incessamment interrompue, il n'efface pas le son, cette autre face du signe qui peut alors reconduire, du fait du rythme et de la syncope, vers le corps et ses blessures."

 


" Le vrai commencement de la poésie c'est quand ce n'est plus une langue qui décide l'écriture, une langue arrêtée, dogmatisée, et qui laisse agir ses structures propres; mais quand s'affirme au travers de celles-ci, relativisées, littéralement démystifiées, une force en nous plus ancienne que toute langue; une force, notre origine, que j'aime appeler la parole." (Yves Bonnefoy, Entretiens sur la poésie)


YVON INIZAN
LA DEMANDE ET LE DON
L'attestation poétique chez Yves Bonnefoy et Paul Ricoeur

Préface de Yves Bonnefoy ("Je n'ai qu'une conviction, et c'est qu'il n'y a de réalité que dans l'échange qui s'établit, l'alliance qui parfois en résulte, entre ceux et celles qui vivent au même moment sur terre, disons même entre ceux-ci et ces autres dans le passé qui ne cessent d'être vivants parmi nous." )

Notre étude s'organisera autour de deux questionnements que l'on pourra dire inversés. On se demandera, d'une part, comment une poésie de la présence, ainsi que la définit Yves Bonnefoy, a trouvé à se nourrir de remarques philosophiques développées dans le cadre des pensées de l'existence. D'autre part, comment le développement de ces pensées, tel qu'on le voit dans la réflexion de Paul Ricœur, en vient à produire les conditions d'un dialogue entre poésie et philosophie et à créer un cadre favorable à l'accueil d'une poésie de la présence.

L'ensemble de l'étude cherchera également à entendre la question posée par le poète et à en saisir l'urgence. Car il se peut qu'en ce siècle entamé, la poésie soit en danger et que la philosophie, sur ce point, ne soit pas innocente : « Elle offre, remarque Yves Bonnefoy, des théories qui sont parfois remarquablement aveugles à l'ambition de la poésie et lui dénie toute spécificité. » La réflexion philosophique débouche, trop souvent, sur une disqualification de l'écriture poétique comme si se rejouait indéfiniment le drame antique qui condamne le poète à l'exil.


"La poésie se doit d'être un acte plus qu'un écrit, un moment de l'existence en mouvement vers son sens plus que la création d'un objet verbal dont son auteur ne serait qu'une dimension parmi d'autres."(Yves Bonnefoy, Livres et documents) La leçon inaugurale au Collège de France, en 1981, présente la poésie comme un projet, lequel porte "non sur des mots dans un manuscrit, mais sur des notions, sur des expériences, dans une pratique de vie"(Yves Bonnefoy, Entretiens sur la poésie). Dès lors, "la poésie n'est rien d'autre, au plus vif de son inquiétude, qu'un acte de connaissance".(Ibid)

Il s'agit d'échapper à la clôture des mots, d'entendre ce qui est au-delà, de s'en faire le témoin, de l'attester.

La parole poétique naît d'une décision continuée. Fragile, elle est une parole discrète - au double sens de ce terme.

Le recours à la parole poétique offre au philosophe de courber réellement son propre discours vers l'exploration de la finitude.

"L'être n'est pas, sauf par notre vouloir qu'il y ait l'être." (Yves Bonnefoy, Entretiens sur la poésie)

"La rencontre de la demande et du don ne devrait-elle pas se faire un dialogue, si ce n'est discussion, avec pour ce faire un vocabulaire que nous puiserions dans le tâtonnement des poèmes?"

"L'arbre n'est pas au-dehors de moi ou de la personne à qui je m'adresse, il n'est pas au-dehors de nous, il est une part de nous, aux marges du corps vivant mais en continuité avec lui. Disons qu'aux débuts de l'humanité celle-ci le prit dans son acte même d'exister, instinctivement, comme un naufragé agripperait une planche. Elle n'en fit pas un objet mais un aspect de sa vie." (Yves Bonnefoy, Le sommeil de personne)

"Le vrai commencement de la poésie, c'est quand ce n'est pas une langue qui décide l'écriture, une langue arrêtée, dogmatisée, et qui laisse agir ses structures propres; mais quand s'affirme au travers de celles-ci, relativisées, littéralement démystifiées, une force en nous plus ancienne que toute langue; une force, notre origine, que j'aime appeler parole."(Entretiens avec Bernard Falciola, Entretiens sur la poésie)

Yves Bonnefoy courbe la véhémence ontologique que réclame le philosophe. Le même souci, la même tension y opère mais le poète plonge davantage, au-delà de toute signification, vers la "matière nue". Il incite le philosophe à redevenir passant, il lui suggère d'accorder un peu moins aux idées, au regard, un peu plus à ses gestes, à l'incertitude et au tâtonnement de ses mains.


.DOMINIQUE JANICAUD
Heidegger en France

I


Allons-nous penser l'horreur nazie grâce à la pensée de Heidegger? Ou tout le contraire: est-ce cette pensée, elle-même leurrée, qui nous bouche la voie de la justesse et de la justice? Ce rappel trop rapide ravive une angoisse et une attente renaissantes (et diffuses dans les rebondissements de la polémique depuis la Libération) qui dépassent de loin la simple énumération des faits exacts ou inexacts sur le comportement de l'homme Heidegger. La question de fond, l'enjeu: y a-t-il un recours en cette pensée? Ce petit homme matois, terriblement intelligent, mais au profil psychologique déconcertant, est-il porteur d'un message, des signes d'une pensée nouvelle, d'un cheminement décidément illuminant pour nos pauvres vies - ou tout cela n'est-il que rhétorique, poudre aux yeux, jeux de langage? On pourra ironiser tant qu'on voudra sur la « légèreté» des uns ou des autres. Vouloir éliminer cette inquiétude et cet espoir, ce serait se résigner à une perte incommensurable: celle de l'interrogation sur le sens même (ou le non-sens) de la détresse de notre siècle et de notre époque.

"J'aime tout cela parce que j'ai la conviction qu'il n'y a pas d'oeuvre essentielle de l'esprit dont les racines ne plongent dans un sol original sur lequel il s'agit de tenir debout." Heidegger


.DOMINIQUE JANICAUD
Heidegger en France

II

Car il faut bien s'entendre sur l'expression « das denkende Diehten ». Sur quoi l'accent est-il mis? L'insistance est sur le déploiement du caractère poétique encore voilé de l'écoute de l'être. La pensée de l'être devra trouver son champ et sa langue. Heidegger a peu d'émules encore dans ce domaine, parmi les « philosophes ». Pour exprimer l'Ereignis, Heidegger nous invite-t-il à trouver une langue nouvelle, capable de dire le séjour terrestre, dans l'humilité et la gloire tout ensemble de notre abandon? Je le crois et c'est ce qui m'anime dans ma propre écriture, qui n'est pas d'abord celle d'un poète, mais n'est plus celle d'un « philosophe». Roger Munier

ANSELME JAPPE
La page Anselm Jappe sur Lieux-dits


PAUL JORION
Défense et illustration du genre humain


"Ici, je dresse l’inventaire de ce que nous, êtres humains, manifestations du vivant, avons pu comprendre jusqu’ici de notre destin, j’évalue chaque élément et je rassemble ces fragments pour en faire un tout, en espérant que ce tout assurera notre salut. Lequel est sérieusement compromis aujourd’hui, soit du fait de notre indifférence – ou, dit plus charitablement, du fait que nous ne nous en préoccupons que de manière intermittente comme d’une question secondaire sans urgence particulière –, soit en raison de notre exigence puérile que toute solution, pour pouvoir être prise en considération, doive déboucher sur un profit."


FRANCOIS JULLIEN
La page François Jullien sur Lieux-dits



AXEL KAHN
Et le bien dans tout ça?

"Selon cette analyse, la définition du bien devient l’ensemble de ce qui prend en compte la valeur de l’autre alors que le mal est défini par ce qui la nie, qui attente à sa sécurité, à son épanouissement et à sa dignité. Le concept de dignité est en réalité d’une extrême complexité dont je m’efforce de rendre compte plus loin ; je l’entends ici seulement dans le sens de l’image que quiconque doit avoir de lui-même."

"J’appelle ici dignité la qualité au nom de laquelle une communauté humaine se fixe le devoir de respecter les êtres, y compris ceux qui sont dans l’incapacité de réclamer leurs droits. La dignité conférée à un humain n’implique pas de devoir, sauf celui de respecter la dignité d’autrui puisque, selon le principe de réciprocité qui fonde ma vision morale, elle ne peut être distinguée de la sienne propre."

"La diversité humaine n’est donc facteur d’enrichissement mutuel que si elle est associée à l’échange. L’uniformité a le même effet que le repli sur soi : dans les deux cas, le dialogue est stérilisé et la civilisation dépérit. "

MELANIE KLEIN
Deuil et dépression

"Le renforcement des sentiments de persécution dans le deuil est d'autant plus douloureux que les relations amicales, qui pourraient être si secourables dans ces circonstances, sont interdites du fait d'un accroissement de l'ambivalence et de la méfiance.
La douleur ressentie au cours du lent processus par lequel la réalité est mise à l'épreuve dans le travail du deuil semble donc provenir en partie de la necessité de renouer, certes, des liens avec le monde extérieur et de revivre ainsi sans cesse la perte éprouvée, mais aussi, et grâce à cela, de reconstruire anxieusement le monde intérieur que l'on sent menacé de déchéance et d'effondrement. Tout comme le jeune enfant qui traverse la position dépressive s'efforce péniblement, dans son inconscient, d'établir et d'intégrer son monde intérieur, la personne en deuil doit réétablir et réintégrer le sien à grand-peine."

VICTOR KLEMPERER
LTI, la langue du IIIè Reich

"Toutefois, le summum de la rhétorique nazie, et ce qu'elle a de plus caractéristique, ne réside pas dans une telle comptabilité séparée pour hommes cultivés et hommes incultes, ni dans le simple fait qu'on impressionne la foule avec quelques bribes d'érudition. La performance proprement dite, et, là, Goebbels est un maître inégalé, consiste à mélanger sans scrupules des éléments stylistiques hétérogènes - non, mélanger n'est pas le mot juste -, à sauter brutalement d'un extrême à l'autre, de l'érudit au rustaud, de la sobriété au ton du prédicateur, du froidement rationnel à la sentimentalité des larmes virilement retenues, de la simplicité à la manière de Fontane ou de la muflerie berlinoise au pathos du soldat de Dieu et du prophète. C'est comme une irritation de la peau sous l'effet alternatif d'une douche froide et d'une douche brûlante, tout aussi physiquement efficace; le sentiment de l'auditeur (et le public de Goebbels est toujours auditeur, même lorsqu'il lit les articles de journaux du Docteur), le sentiment n'est jamais en repos, il est en permanence attiré et repoussé, repoussé et attiré, et l'esprit critique n'a plus le temps de reprendre son souffle."


"Pour Klemperer, comme pour la majorité des intellectuels juifs d'Europe moyenne et occidentale de l'entre-deux-guerres, le sionisme et la perspective d'une résolution de la prétendue question juive via l'étatisation et la nationalisation des Juifs se présente comme une lubie essentiellement portée par cette sorte d' « obscurcissement » abattu sur le monde qui a donné naissance au nazisme. Plaçant son existence sous le signe de la profession de foi universaliste : « J'aimerais bien me fondre dans le général et suivre le grand courant de la vie ! », il note dans son journal, dès 1933 : « La chose la plus lamentable entre toutes, c'est que je sois obligé de m'occuper constamment de cette folie qu'est la différence de race entre Aryens et Sémites, que je sois toujours obligé de considérer tout cet épouvantable obscurcissement et asservissement de l'Allemagne du seul point de vue de ce qui est juif. Cela m'apparaît comme une victoire que l'hitlérisme aurait remportée sur moi personnellement. Je ne veux pas la lui concéder. »
Ce n'est pas la moindre des actualités du livre de Klemperer qui vient poindre dans cette remarque : il s'y présente, certes, comme celui qui « a raison » contre le troisième Reich qui l'opprime parce qu'il incarne la ténacité de la raison contre la cristallisation de la déraison en puissance tyrannique. Mais il y apparaît aussi par avance comme la conscience critique d'un monde d'après Auschwitz établi dans le confort sournois d'une « réparation » de l'outrage fait aux Juifs en forme d'institution d'un bloc de puissance juive installé comme un vigile de l'Occident au cœur du monde arabe.
Klemperer nous exhorte à ne pas plier devant l'injonction à voir le principe rationnel de l'histoire à l'œuvre dans le déploiement de la puissance réelle et à redresser sans relâche les énoncés lancinants qui se rattachent cette situation. Comme manuel de survie intellectuelle contre la tyrannie, LTI est une méditation sur l'illusion d'éternité dont se bercent les oppresseurs, les imposteurs et et les importants qui leur font cortège. En cela, loin d'être seulement un irremplaçable « document » sur nazisme, il nous parvient aussi comme un mode d'emploi critique de notre présent."
Alain Brossat

JULIA KRISTEVA
Etrangers à nous-mêmes

Ne pas" intégrer" l'étranger, mais respecter son désir de vivre différent, qui rejoint notre droit à la singularité, cette ultime conséquence des droits et des devoirs humains.


JEAN-JACQUES KUPIEC
Et si le vivant était anarchique

"Un corps vivant n’est pas un tout centralisé dans lequel chaque partie est dévouée à son bon fonctionnement. C’est une communauté cellulaire autogérée qui résulte des interactions entre ses parties et le milieu intérieur. Les cellules ne sont pas là pour former l’organisme. Elles vivent pour elles-mêmes, et sont en même temps amenées à coopérer du fait des contraintes imposées par le milieu intérieur. Elles ne se différencient pas sur instruction du génome, mais spontanément par variations aléatoires collectivement régulées au sein de la société cellulaire. Cette théorie élargit le champ d’application du darwinisme : la variabilité est la propriété première du vivant, y compris dans le milieu intérieur, et la lignée généalogique son entité première. L’ontogenèse et la phylogenèse ne sont pas deux phénomènes distincts, mais deux aspects d’un seul et même phénomène de propagation du vivant."

" La cellule exprime au hasard différentes combinaisons de gènes jusqu’à ce qu’elle « trouve » celle correspondant au nouveau type cellulaire qui lui permet d’interagir avec son milieu intérieur et de se stabiliser."


"Le protiste eucaryote Dictyostelium discoïdeum vit alternativement comme amibe unicellulaire ou comme petit champignon multicellulaire, selon que l’environnement est riche ou pauvre en nutriments. Dans ce dernier cas, les amibes forment un champignon composé de deux sortes de cellules, dont l’une génère des spores qui, à leur tour, génèrent de nouvelles amibes lorsque l’environnement redevient favorable, alors que l’autre forme le « pied » du champignon. Qui est l’individu dans ce cycle : l’amibe unicellulaire ou le champignon multicellulaire ? Les deux sont des unités fonctionnelles et morphologiques. Où commence et où finit ce processus ? Nous avons affaire à un cycle continu, alternant des phases unicellulaires et multicellulaires, qui se poursuit indéfiniment en fonction des conditions environnementales et qui n’a ni début ni fin précis. Nous continuons à employer le terme « cycle », couramment utilisé en biologie, mais, à strictement parler, il est devenu impropre dans le cadre de la théorie de l’ontophylogenèse car il porte l’idée d’une répétition à l’identique alors qu’il y a toujours variation, d’une manière ou d’une autre. "

"De la même manière, dans le cadre de l’ontophylogenèse, l’organisme individuel tombe de son piédestal. Il n’est plus la finalité d’une ontogenèse objective qui ferait de lui l’entité première du vivant. Il n’est qu’une phase des cycles cellulaires et multicellulaires qui font les lignées généalogiques. Le « développement embryonnaire » n’est qu’un segment répété et variable que nous abstrayons de la lignée généalogique."